Daaaaaalì
Cette semaine on va parler du dernier film de Quentin Dupieux, Daaaaaali, avec six fois la lettre a, comme le nombre d’interprètes qui jouent le rôle de l’artiste : Édouard Baer, Jonathan Coen, Gilles Lelouche, Pio Marmai, Boris Gillaud et Didier Flamand. Leur temps à l’écran est assez inégal, et c’est surtout Jonathan Coen et Edouard Baer qui se partagent la majorité du rôle. il faut admettre qu’ils sont les deux acteurs les plus convaincants pour incarner, avec leur excentricité naturelle, le rôle de dali.
Un biopic ?
Si vous allez voir le film en souhaitant approfondir votre connaissance de l’oeuvre du peintre, vous risquez d’être déçu. Le film est plutôt un prétexte pour Dupieux, lui permettant de rendre hommage à l’existence excentrique du peintre, plutôt qu’à son oeuvre, mais aussi de souligner sa filiation avec Luis Bunuel, le réalisateur avec lequel Dali a co-réalisé un chien andalou, chef d’oeuvre du cinéma surréaliste.
Il y est question d’une interview, puis d’un film, qu’une jeune journaliste, incarnée par anais demoustier, souhaite faire sur l’artiste espagnol. Les obstacles pour parvenir à la réussite de cette interview sont nombreux, allant de la taille de la caméra au caractère totalement mégalo de Dali. Le scénario est loin d’être linéaire. Dupieux joue avec le comique de répétition, les motifs changent légèrement d’une scène à l’autre, soulignés par la bande originale. Le rêve d’un prêtre, par exemple, permet une mise en abyme comique : on ne sait plus si l’on est encore dans le récit du rêve ou dans un retour à la réalité. L’exploitation de cette frontière entre réel et irréel est une des constantes du cinéma de Quentin Dupieux, dont la filmographie s’agrandit à une vitesse ahurissante.
Une sortie tous les six mois, récemment : Incroyable mais vrai, Fumer fait tousser, Yannick, et donc Daaaaali sont tous sortis ces deux dernières années. Il y a plusieurs registres chez Dupieux, certains spectateurs vont préférer ses films avec un propos discernable, comme Yannick, d’autres préfèreront ses sorties outrageusement ridicules, à se tordre de rire, comme Mandibules ou Fumer Fait Tousser, (à condition évidemment d’adhérer à l’humour ubuesque du réalisteur ultra-productif).
Et alors est ce que ce Daaaaaali est un bon Dupieux?
On peut dire que c’est un Dupieux plus mainstream, servi par un casting deluxe, le réalisateur semblant donner envie à toutes les plus grosses stars du cinéma français de jouer pour lui. On rigole évidemment en regardant Daaaali, mais on n’atteint ni les sommets comiques et ridicule d’un mandibule, ni la profondeur inquiétante de films comme le daim ou réalité. On est dans un humour qui rend hommage au surréalisme, flirtant parfois avec la citation. Dupieux vise peut-être un surréalisme trop historique, qui nous fait penser au fantome de la liberté de Luis bunuel, mais en moins vindicatif et critique, là ou certains de ses autres films savaient allier l’absurde avec le grotesque, donnant forme à un amas de conneries hilarantes finalement plus authentiques.
Plutôt une déception donc?
Un film de Dupieux, même mineur, fait toujours du bien dans le paysage cinématographique, par sa légèreté, notamment. Mais à trop vouloir rendre hommage à ses inspirateurs, Dupieux en vient à faire une forme de caricature de ses propres films. Il,faut reconnaitre qu’avec sa productivité et son talent, le réalisateur nous rend difficile... Disons pour résumer que ce film est pour vous si vous êtes un inconditionnel du cinéaste, si vous avez envie de voir l’hommage teinté de dérision et d’autodérision que Dupieux rend à l’artiste médiatique et au personnage qu’était Dali. C’est clairement moins pour vous si vous rêviez d’un biopic classique sur le peintre, avec un angle documentaire et historique.
Un extrait de la bande son
J’aurai pu, car la bande son est signée de l’ex daft punk, Thomas Bangalter, mais elle repose surtout sur la répétition d’un motif, on l’a dit, pour souligner le comique de répétition très présent dans le film. Alors je préfère vous laisser avec un morceau de Quentin Dupieux lui même, sous son alias musical celui de Mr Oizo, avec le titre positif