Raje Fait Son Festival /// Mimosa par Adeline Avril
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MIMOSA
Auteur
Interprètes / Intervenants
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Mise en scène : Amandine Raiteux
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Interprétation et collaboration à l'écriture : Julie Cavanna
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Costumes : Alain Blanchot
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Lumières : Stéphane Baquet
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Complicité Artistique : Laurent Couraud
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Diffusion : Sylvain Berdjane
1 rue Séverine
84000 - Avignon
Nom de la salle : Salle 3
Julie Cavanna incarne Mimosa, adolescente souffrant d’anorexie, avec un brio remarquable.
La scénographie minimaliste et subtile participe de ce tour de force réussi, à savoir nous permettre de comprendre comment Mimosa en arrive là, à peser le poids d’une plume en se croyant toujours grosse. Ses carences affectives, et ce désir de contrôler au moins la nourriture qui entre dans son corps, et son poids, à défaut de contrôler sa vie, sa relation à sa mère, à sa sœur, si parfaite.
La mise en scène d’Amandine Raiteux, astucieuse, nous met face à quelques chaises et des chiffres écrits à la main sur des bouts de papier, qui rythmeront l’avancée en âge mais aussi dans la pathologie, d’une Mimosa qui devient jeune femme et ne comprend pas pourquoi son père s’inquiète de ce poids qu’elle maitrise si parfaitement, avec des techniques huilées, des rituels qui lui donnent la sensation de dominer sa vie alors qu’elle s’éteint, sans en avoir conscience.
Ce spectacle, grâce à un texte qui n’est jamais sinistre, bien au contraire, traduit à la fois toute l’ingénuité d’une adolescente trop sensible à ce et ceux et celles qui l’entourent et le compte à rebours physiologique qu’elle s’impose.
Aucune psychologisation, aucune outrance. Nous pouvons grâce à cette pièce comprendre l’incompréhensible, en nous glissant dans la vie de Mimosa, si attachante, naïve et brillante à la fois. Comprendre Mimosa qui construit pour survivre une incroyable ingénierie de la faim, nourrit son âme en effaçant son corps.
C’est un seul en scène qui toutefois parvient à faire apparaître les divers protagonistes de la vie de Mimosa. Car Julie Cavanna a ce don de les faire apparaître aussi, fugacement, ou de façon plus appuyée. Ainsi, l’on saisit sans exposition didactique les enjeux des relations familiales qui conduisent Mimosa à ce que nous nomons pathologie mais qu’elle, Mimosa, voit comme un ensemble de victoires pour supporter et surtout soumettre, dompter, son corps de femme et la place qu’elle tient dans la famille.
C’est, enfin, un ode à l’amour et à l’espoir qui nous conduira de cette façon subtile vers la réconciliation de Mimosa avec son corps, avec la nourriture, avec la vie, sans toutefois évacuer la question grave des nombreuses victimes tombées sur le champ de cette guerre de la faim.
C’est une œuvre forte,un texte qui sonne vrai, qui touche profondément, tout en sensibilisant à la réalité des troubles de l'alimentation et des désespoirs cachés des adolescents. C’est avant tout un beau moment de théâtre authentique et une performance magnifique de Julie Cavanna.
Adeline AVRIL
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