La Payola : nos goûts musicaux ont-ils été manipulés ?
19 avril 2022
La Payola, pratique litigieuse mais profiteuse
Dans cette émission, on aime bien déterrer des petits potins en tout genre. Mais cette fois, on va se pencher sur un cas un peu plus grave, qui va peut-être bouleverser votre manière de voir l’industrie musicale. A votre avis, quel est le point commun entre Marshmello, Ed Sheeran, et les Backstreet Boys ? Certes, ce sont tous des artistes reconnus. Mais ce sont aussi des artistes qui auraient eu recours à la Payola, d’après le site Rolling Stone en tout cas. Or, la Payola, c’est une pratique consistant à payer une personne en échange d’une promotion « non officielle ». Par exemple, une maison de disques envoie de l’argent à des stations de radios pour que ces dernières diffusent sur les ondes en priorité des morceaux édités par cette maison de disque. Cela permet de gonfler l’exposition des artistes, et le classement dans les listes de lecture. En soi, l’acte ne devient illégal qu’à partir du moment où on ne mentionne pas aux auditeurs que la chanson diffusée est diffusée à titre promotionnel, en tout cas depuis 1960, année qui marque l'interdiction de la démarche.
Alors on parle avant tout de la radio, parce que c’est le média qui était le plus démocratisé vers la moitié du XXème siècle, mais la télévision est aussi concernée. Le scandale le plus connu est celui de l’animateur Dick Clark, host de l’émission musicale américaine extrêmement célèbre American Bandstand. Le programme télévisé avait tellement de succès que les morceaux diffusés voyaient très souvent leurs ventes exploser. Et il se trouve que notre ami Clark, conscient du succès, accepta de toucher 25% de la redevance d’un éditeur en échange de la promotion d’une chanson ou d’un artiste. Il est allé jusqu’à créer un entreprise écran pour recevoir les droits et collecter les redevances tellement les profits étaient élevés. On jette beaucoup la pierre à Dick Clark, mais n’oublions pas que beaucoup, vraiment beaucoup de DJs faisaient la même chose. Donc, comme je l’ai dit, la Payola a été interdite vers 1960, mais cette loi d’interdiction présentait plusieurs lacunes, qui ont fait que la pratique a continué avant d’être freinée vers la fin des années 1980, grâce à la révélation de différents scandales par les journalistes.
Alors aujourd’hui, la radio a moins de pouvoir qu’avant, notamment à cause des services de streaming musical et internet. Mais pour autant, la pratique de promotion d’artistes existe toujours, à travers les playlists principalement. Par exemple, Cardi B a pu conclure un partenariat avec Apple Music, ce qui est légal, du moment qu’on informe les utilisateurs de ce partenariat. Pour autant, en 2015, Bilboard Magazine a révélé de nombreux cas de Payola à travers le paiement de créateurs de playlists pour l’intégration de titres spécifiques dans des playlists à forte audience. Spotify, face à cela, a donc mis à jour ses conditions générales d’utilisation pour interdire aux usagers « d’accepter toute indemnisation, financière ou autre, afin d’influencer le nom d’un compte ou d’une playlist ou le contenu d’un compte ou d’une playlist ». Mais par la suite, en 2020, Spotify offrait aux musiciens et labels discographiques la possibilité d'être davantage mis en avant dans certaines playlists personnalisées de ses abonnés, en échange d'une ristourne sur les droits que Spotify doit leur reverser. Est-ce qu’on ne serait pas là vers une forme indirecte de Payola ? Bref, La Payola a aujourd’hui évolué, et on pourrait aussi citer la création de bots qui vont gonfler le nombre de vues sur YouTube comme étant de la Payola.
Bon, je pense avoir dit l’essentiel, mais je vous invite malgré tout à vous renseigner sur le sujet, tant il y a de choses à dire. Je me permets de joindre une vidéo si jamais cela vous intéresse. Alors oui c'est en anglais, mais c'est de loin la plus complète que j'ai pu trouver. Et si vous vous posez la question, chez Raje, on est clean, d’ailleurs Pascal Nègre dit que la Payola n’a jamais eu cours en Europe, et que la pratique concernait surtout les Etats-Unis. Sauvés !
Alban